Observations de la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur les droits des personnes handicapées

Les droits des personnes handicapées en France, en 2017

Mme Catalina DEVANDAS-AGUILAR, Experte indépendante, est intervenue en qualité de Rapporteuse spéciale de l’ONU sur les droits des personnes handicapées.
http://www.ohchr.org/Documents/Issues/Disability/BrochureSR_FR.pdf

Elle a rendu publiques ses observations, au terme de sa visite officielle en France, du 3 au 13 octobre 2017.

Cette visite avait pour objet le suivi de la mise en œuvre par la France de la convention internationale relative aux personnes handicapées, ratifiée en 2010.

Le texte intégral de la Convention relative aux droits des personnes handicapées :est ici : http://bit.ly/2l5QTSi

En attendant le rapport final, annoncé pour 2019, la mesure des critiques ou des « recommandations » peut déjà être prise et susciter des réactions.

A propos de la protection juridique des majeurs, l’experte conclut sans surprise à la non-conformité de certaines des dispositions françaises en vigueur à l’article 12 de la convention DPH.

Elle vise notamment le code électoral, le code civil et le code de la santé publique.

Il est fait référence au fait que des personnes handicapées, notamment des personnes autistes ou avec handicap intellectuel et psychosocial, seraient

« placées sous tutelle ou curatelle de façon systématique afin, notamment, de faciliter les procédures d’accès aux prestations sociales ou le placement en institution ».

L’experte rappelle que d’autres mesures pourraient être mobilisées, ainsi que le Défenseur des droits l’avait déjà exposé dans son rapport du mois de septembre 2016. Elle cite pour cela la sauvegarde de justice, le mandat de protection future, la mesure d’accompagnement social personnalisé et la mesure d’accompagnement judiciaire, en les présentant comme des alternatives à la mise sous tutelle ou curatelle. Ces mesures seraient de nature à soutenir les personnes handicapées dans l’exercice de leur capacité juridique mais sont

« peu utilisées en raison du manque de formation et de sensibilisation chez les juges, les avocats, les familles et la population en général ».

Si ces moyens permettent l’accompagnement ou la protection, ils diffèrent cependant de la curatelle et de la tutelle. Ces mesures ne sont pas interchangeables et n’ont pas, entre elles, qu’une différence de degré. La sauvegarde ne permet de répondre qu’à la nécessité d’une protection temporaire ou ne sert à la représentation que pour accomplir certains actes déterminés. Elle ne peut donc pas servir à protéger durablement une personne qui en a besoin. Le mandat de protection future pourrait certainement être utilisé plus largement par les parents, dans le cadre du mandat pour autrui, et ce dès avant l’âge de la majorité de leur enfant. Cette mesure n’affecte pas la capacité juridique de la personne protégée mais reste toutefois une mesure de représentation, non d’accompagnement, tout au moins pour la gestion des biens. Les deux mesures d’accompagnement ont aussi leur intérêt, mais elles sont toutes deux limitées dans le temps (deux ans et au maximum quatre en cas de renouvellement). Sauf à pouvoir espérer un retour à l’autonomie dans ce délai légal, ces mesures risquent de ne pas répondre aux besoins de la personne en situation de handicap.

L’experte précise ensuite que

« la mise sous tutelle prive les personnes de leurs droits et entraîne un risque d’abus et d’institutionnalisation »

et

« exhorte la France à revoir sa législation afin d’éliminer tout régime de

prise de décision au nom d’autrui ».

Si la représentation est bien la règle pour les actes patrimoniaux, elle ne l’est pas, en revanche, pour les actes personnels. Sur ce point, la législation française fait prévaloir l’autonomie. Ce à quoi il faut veiller, c’est à l’effectivité du dispositif. Pour les personnes hors d’état de manifester leur volonté, le dispositif de la décision accompagnée reste inopérant, ce que ne nie pas le défenseur des droits…

Le sur-mesure s’impose et devrait sans doute éclipser le prêt-à-porter, sans pour autant devoir dépiécer la représentation, qui a pour but l’exercice des droits, non la négation de la personne.

@ suivre…
L. Gatti